Chic ! Le FoMu, Musée de la photographie d’Anvers, consacrera au printemps 2019 une large exposition et une vaste publication au livre photographique en Belgique : son histoire, ses formes, ses discours, sous la houlette notamment de Tamara Berghmans.
En attendant, cela fournit l’occasion de faire le point, à vol d’oiseau, sur trois territoires en plein questionnement, en grande turbulence : le livre ! et la photographie ! et la Belgique ! Surtout dans le cadre d’un site, BrowniE, dédié depuis ses origines à la photographie « de » et « en » Belgique, et attentif à l’actualité de l’édition.
Voici donc une modeste proposition, quelques savoureux zakouskis visuels : avant-goût et balises, annonçant un terrain de recherche plus large, une zone en friche ou en chantier… La photographie belge nous parle ici… de la Belgique photographiée ! Retour au pays et trajectoire tantôt auto-fictive, tantôt photobiographique; enquête sociologique, récit anecdotique ou déambulation contemplative; clin d’œil poétiquement correct ou politiquement impertinent — à lire à même l’image, ou entre les lignes… Des clichés, somme toute. Ou leur contraire. Ou le contraire de leur contraire.
Un pays ce sont avant tout des gens, des signes, et leur rencontre sur fond de paysages. Les combinaisons ne manquent pas ! Car enfin, avec ou sans fierté, si régulièrement des opérateurs de par le monde se penchent sur leur propre nation, leur territoire, leur culture, leur identité, rarement les photographes d’un pays donné semblent, autant qu’en Belgique, s’être montrés aussi préoccupés par la question de ce « pays » lui-même.
Comment ça se repère, sur une photo, l’accent belge ? … La frontière linguistique est-elle soluble dans les infra-rouges, les épines d’Ardenne dans le pixel marin ? … Le Belgien moyen est-il si typique, ou trop peu pittoresque ? Ça fait quoi, d’être un pays inventé à la même époque que la photographie ? … Une patrie qui ne tourne ni rond ni carré, et qui sème son étroitesse dans les bords dentelés, irréguliers, d’un album de famille à moitié déchiré ? … « Certes, disait le bon Van Bruaene, nous ne sommes pas assez rien du tout. »
Quadrillée, rapiécée, cernée ou déboussolée, la Belgique semble bornée, à ses points cardinaux, par l’inquiétude existentielle, le jeu léger, la fascination têtue et le détachement ironique. Mais on y perd vite le nord, et tout se mélange tellement qu’il faudrait presque pouvoir le photographier, pour y croire et s’y retrouver…
Et d’ailleurs… si la Belgique, finalement, n’existait qu’en photo ? Ou dans un livre qui se raconte des histoires ? Ce serait, tout compte fait, déjà pas si mal. À suivre, et à vérifier bientôt au FoMu !
Emmanuel d’Autreppe
Emmanuel d’Autreppe est commissaire, éditeur, enseignant, rédacteur… et collabore à de nombreux projets de valorisation de la photographie tant au nord qu’au sud du pays.
Illustrations et bibliographie :
– Olivier Cornil, des séries Mon pays noir et Ambiguïtés, du livre Homeland/Vladivostok, Yellow Now, 2014.
– Michel Castermans, de la série Frontière/Grens, Yellow Now, 2010 – Au sujet de la frontière linguistique.
– La Belgique vue du frigo, projet de Prismes éditions, Bruxelles; photos de Lucas Leffler et Benoit de Moffarts, 2015.
– Stephan Vanfleteren, Belgicum, Lannoo, 2007 (et rééditions).
– Harry Gruyaert (Magnum), Made in Belgium, Robert Delpire Editeur, 2000.
– Guy Jungblut et François de Coninck, La Belgique vue du ciel/De Lucht gezien vanuit België, 2005-2012 et Yellow Now, 2012.
L’exposition Belgian Photobooks (titre provisoire) sera à découvrir au FoMu (Waalsekaai, 47 – 2000 Anvers) du vendredi 1er mars au dimanche 6 octobre 2019.
Vernissage le jeudi 28 février 2019.
Sixième jour et sixième contenu de fête pour cette semaine anniversaire !
L’invité du jour, Emmanuel d’Autreppe évoque en primeur une exposition qui fera l’événement au FoMu en octobre. Elle sera consacrée… au livre photographique en Belgique !
C’est peu d’écrire que, chez BrowniE, on a déjà hâte de découvrir ça…